Une tournure étrange...

L'homme chevauchait à travers les paysages grandioses qui composaient le Royaume d'Erténot. Il cheminait à travers les plaines rocailleuses, sur les hauts plateaux balayés par les vents violents qui dessèchent l'herbe et appauvrissent la terre, ou encore par-delà les champs fleuris inexploités qui bordent les falaises de la Faille du Néant. Le ciel restait le plus souvent lourd et chargé de nuages couleur perle qui assombrissaient considérablement l'horizon, mais il arrivait que des rayons de soleil réussissent à percer l'épaisse couche brumeuse pour venir éclairer cette terre pleines de richesses.

Après plusieurs jours passées à voyager à travers tout le royaume, il put enfin discerner la capitale, Lansline, et les premières chaumières de sa périphérie. Le terme de son voyage était le Palais Royal, construction majestueuse représentative de la puissance des animux, dans lequel résidait la reine Lyria Crow, détentrice d'une force prodigieuse et d'un sang pur qui lui permettait de prétendre au rang de combattante et de dirigeante qui, il fallait le dire, en jetait.

Après être arrivé en début de matinée, il passa sa journée à rôder autour du palais en essayant de glaner des informations auprès des habitants de la capitale, tout en scrutant chaque détail de l'architecture du bâtiment afin de déceler la moindre faille dans le système défensif mis en place. Mais le palais avait été conçu pour repousser tous les assauts et pour empêcher les visiteurs indésirables d'entrer, si bien qu'il lui fallut attendre que le crépuscule soit dépasser de quelques heures pour enfin trouver le moyen de s'introduire dedans.

Les deux seuls murs qui lui offraient la possibilité de les escalader se trouvaient être la façade nord, qui donnait sur une place fréquentée jour et nuit, et un pan de mur à l'extrême opposée de l'entrée principale, qui jouxtait un immeuble à quelques étages. Ainsi, en se mettant dos à l'immeuble et face au palais, il pouvait grimper sans aucune difficulté et sans être vu. Néanmoins, ce mur était dénué de fenêtre, aussi lui fallut-il trouver un autre moyen de pénétrer dans le grand bâtiment.

La réponse lui apparut presque instantanément quand il arriva au terme de son ascension. En haut, une trappe finement encastrée dans un bloc de marbre plus large que les autres portait les armoiries royales. Sans doute l’échappatoire prévu en cas de siège. L'homme sorti un coutelas de son armure, et d'un habile tour de main délogea le bloc, qui alla s'écraser avec un bruit mat en bas. Pas très discret, mais les rues alentours étaient désertes.

Aussitôt, il se hissa dans l'ouverture, et découvrit un petit tunnel qui montait sur une dizaine de mètres avant de déboucher sur un couloir richement décoré. Sur les murs et le sol, des tapisseries en soie ou en velours ornaient chaque mètre carré de la surface occupée, et les tableaux se succédaient les uns aux autres, chacun de l'un d'eux représentant une personne différente. Toute cette richesse lui fit tourner la tête pendant quelques secondes, mais bien vite il oublia sa soif d'argent pour se concentrer à nouveau sur sa mission. Seule une chose comptait.

Glissant le long des murs, il s'infiltra en douceur, cherchant la salle qui contenait ce pourquoi il était là. Il progressait vite, ouvrant et refermant les salles, si silencieux que nul ne pouvait l'entendre. Enfin, les portes uniques laissèrent place à une double-porte en bois sculpté, également à l'effigie des armoiries. Elle n'était pas verrouillée, aussi décida-t-il de jouer la carte de la méfiance. Dans un mouvement impeccable, il ouvrit les battant de la porte sans même laisser le moindre son s'échapper, et risqua un coup d’œil à l'intérieur. Il se figea.

Elle était là. Myrn Feredir, la lame toute puissante, le “ Chasseur Noir ”. L'épée qui avait été forgée dans un métal de la plus pure qualité, incassable. Son pommeau était orné de plusieurs gemmes d'une valeur inestimable, qui chacune recelait un pouvoir différent. Elle semblait briller sous la lumière du lustre de cristal qui diffusait doucement sa lueur sur le revers de la lame, si bien qu'on aurait pu croire que son origine était divine.

Mais ce qui avait fait se figer k'homme, c'était la jeune femme dont la main reposait sur l'épée, et qui était dos à lui. Sa chevelure blonde retombait en fines mèches sur son dos, et tout dans sa posture laissait penser qu'elle était dangereuse. Le fléchissement de ses jambes, les muscles de ses bras contractés... Elle était prête à engager le combat. Et pourtant, il était certain qu'elle ne l'avait pas vu.

Son objectif, c'était l'épée. Et il la récupérerait, coûte que coûte. Il laissa glisser le long de son bras un poignard dénué de poison, et tout en se rapprochant d'elle, il positionna le tranchant de la lame parallèlement à son cou. Aussi, quand il arriva près d'elle, il n'eut aucune difficulté à loger le couteau sous sa gorge, en appuyant très légèrement sur une des veines vitales qui s'y trouvait.

Les paysages d'Erténot au coucher du soleil étaient sûrement les plus beaux du monde, de l'univers même. Les collines à perte de vue, les arbres en fleurs, le dégradé unique du ciel, une légère brise et de l'une des hautes tours de palais, les cheveux au vent, la reine observait. La tête dans les mains, ses yeux noirs perdu dans des pensées inconnus, sa longue robe noir qui soulignait ses formes, tout chez elle la rendait attirante, dangereuse, majestueuse. Pourtant la jeune fille rêvait d'une autre vie que d'être coincé par tant de responsabilités. Le reflet de ses yeux renvoyait des images ballades dans les montagnes les plus hautes, des combats épique à en perdre son souffle, des nuits à la belle étoile; elle soupira longuement tandis que les derniers rayons du soleil laissaient place à la noirceur de la nuit. Elle soupirait beaucoup en ce moment, un peu trop peut-être.

Elle se releva de la fenêtre et referma doucement la fenêtre. Sa chambre était composée d'un grand lit à baldaquin à draps de soie terrienne rouge, une très grande penderie qui ne servait guère, un miroir à pied; une chambre de fille quoi. Seul une épée qui était exposée dans une armoire en verre donnait un peu de virilité à la pièce. Avec grace, elle s'allongea sur son lit, contemplant le plafond peint de la carte des étoiles du monde.

Pendant un long moment elle laissa son esprit se perdre dans la Voie Lactée quand tout à coup, un bruit cristallin se fit entendre au milieu du silence monotone de sa vie. Il parvenait de son poignée où était attaché un bracelet en argent. Celui-ci avait été muni d'un communicateur magique qui permettait à ses gardes de la contacter en cas de danger.

- Majesté, un intru est entré par l'une de vos sorties "secrètes". Il est au quatirème étage, dans l'aile ouest.

Les yeux de sa "majesté" se mirent à pétiller d'excitation, elle sauta de son lit d'un bond:

- Faites-vous le plus discret possible, je pense savoir ce qu'il veut. Interdiction de l'intercepter, et Sirrius, s'il vous plait, arrêtez d'être aussi solennel avec moi.

Oubliant même jusqu'à se chausser, elle attrappa l'épée et sortit en courant de sa chambre, son cerveau imaginant à toute vitesse toutes sortes de plan pour coincer l'intru, plus farfelu les uns que les autres. Quelques secondes plus tard elle entra dans la chambre de son double (oui elle avait un double, puisqu'elle est reine, autant profiter de ses avantages) qui sorti de son sommeil en sursaut. Elle n'eut pas besoin de dire un mot, elle vit simplement le regard de sa reine et parti enfilé une tenue descente et la perruque blonde qu'elle avit besoin pour couvrir sa chevelure brune. Lorsqu'elle fut prête, toutes deux sortirent et prirent la trape qui se trouvait une salle plus loin et qui permettait de rejoindre la salle d'entrainement de l'aile ouest, au troisième étage.

C'était une grande salle qui contenait beaucoup de mannequin en mousse, bois, métaux, etc. Expliquant la situation à la brunette, elle lui tendit l'arme et lui demanda de faire comme si elle s'entrainait. Lyria se transformant en louve blance et alla se poster près d'une armure, dans un coin où personne ne la remarquerai. L'imbécile, elle en était sûre, allait se précipiter dans la gueule du loup. Sirrius la rejoint, accompagné de quelques gardes. Il se transformait en un animal qui était pratique, un cobra royal noir. Ses subordonnés étaient, quant à eux, en chauve-souris, nécrobo et autres animaux très discrets.

Comme prévu, la porte s'ouvrit tout doucement et un homme assez grand entra dans la salle. Il avait les cheveux noirs et les yeux écarlates, il était assez charismatique et Lyria aimait bien se genre de garçon mais il ne fallait pas être distrait... La brunette tournait le dos au visiteur et ne semblait pas l'avoir remarqué. Elle était en position d'attaque, c'est ce qui figea un instant( peut-être l'homme. Puis celui-ci s'élança avec rapidité vers elle en lui plaçant un poignard sur la carotide.

Lyria soupira mentalement, heureusement qu'il ne l'avait pas tué et heureusement qu'elle avait signé un contrat qui stipulait qu'avec le salaire exorbitant qu'elle avait, elle pouvait bien mourir sans qu'aucune responsabilité retombe sur la reine. Une goutte de sang glissa le long du cou de la jeune femme et elle se pétrifia. La prochaine fois, elle choisirai une personne qui connait les situations tendues (*secoue la tête mentalement*) .

Sirrius était à présent à côté de la jambe de l'imbécile et elle, avec rapidité, se retransforma au moment où elle arriva sur lui. Elle dégaina le poignard qui se trouvait dans sa jarretière (comme quoi, les trucs de filles, ça sert des fois) et le plaça à son tour sur la carrotide du jeune homme.

- Bonsoir mon mignon, tu cherches les ennuis, susurra-t-elle à son oreille.

S'appliquant à appuyer assez fort, plusieurs gouttes de sang coulèrent sur son cou. Sirrius avait discrètement planté ses crocs dans la cheville du jeune homme et s'éloignait dans un coin de la salle, préparant ses hommes à une éventuelle riposte. Son venin allait rendre le jeune homme très engourdit et Lyria sourit à pleine dent.

Spoiler:

Sayanel s'était fait avoir en beauté. Bon, d'accord, son entrée dans le palais n'avait pas été des plus discrètes, mais il ne s'attendait tout de même pas à un accueil aussi musclé. Il avait déjà entendu parlé de la légendaire courtoisie des Animux, mais à ce point...

Premièrement, il ne s'était rendu compte de la présence des bestioles qui devaient sans doute être de la garde qu'après avoir traversé la pièce. Oui, cette grande pièce, pleine de zones d'ombres où l'on peut facilement se cacher. Surtout quand on est pas plus grand qu'un nécrobo.

Deuxièmement, il n'avait compris qu'après que la lame de son poignard soit rentrée en contact avec le cou de la jeune femme que cette dernière n'avait rien d'une combattante. La posture était feinte, comme répétée des milliards de fois dans un seul objectif : tromper l’ennemi.

Troisièmement : le cobra. Cette satanée bête qui n'en était pas une venait de le mordre, et une nouvelle fois, sa vue humaine n'avait pas su le repérer avant qu'il ne plante ses fichus crocs dans sa cheville. Il ne lui restait plus qu'à espérer que les diverses toxines qu'il adsorbait régulièrement lui fourniraient une défense assez efficace contre le venin du serpent. Une défense qui durerait assez longtemps.

Quatrièmement, il avait beau être d'un naturel plutôt optimiste, là, c'était assez mal parti. Il était en infériorité numérique, et l'effet de surprise avait naturellement été totalement inutile. De plus, il avait équipé sa simple armure de cuir, et un combat en mêlée pure et dure signifiait une mort certaine.

Il prit quelques secondes pour réfléchir. Comment sauver sa peau, tout en s'emparant de l'épée ? Toujours silencieux, il jeta un regard oblique vers cette dernière. Si proche, et pourtant inaccessible...

Sayanel sentit la lame s'enfoncer un peu plus dans sa chair. Elle s'impatientait ? Il bloqua sa respiration et tenta d'évaluer les différentes options qui s'offraient à lui, puis banda ses muscles, sa décision prise. Il ne douta pas une seule seconde. Il n'avait plus le droit à l'erreur. Chaque geste comptait, et était déterminant pour sa survie. Rapide comme jamais, il pivota sur lui-même et poussa son otage loin de lui, tout en lui arrachant Myrn Feredir des mains. Son geste lui valut une belle entaille sur le cou, et il grimaça. Le sang coulait à présent abondamment, mais pas assez pour que cela l'inquiète vraiment.

Il se retourna et avisa l'autre blonde qui se tenait en face de lui, lui bloquant la sortie. Un sosie de l'autre, et pourtant c'était elle l'originale. C'était forcément elle. Plus majestueuse, plus puissante. Plus féroce, aussi. Le sang de Sayanel ne fit qu'un tour. C'était son billet de sortie.

Il se précipita vers elle, et malgré la dague qu'elle tenait toujours pointée dans sa direction, il réussit à passer derrière son dos, mais s'arrêta, au lieu de continuer vers la sortie. Dans la salle, les gardes commençaient à s'agiter. S'il décidait de fuir maintenant, il n'était pas sûr d'en ressortir vivant. En revanche...
Il attrapa la jeune femme par la taille, et planta son épée à deux centimètres de son ventre.

- Plus un geste ou elle meurt, clama-t-il d'une voix sereine mais inquiétante.

Et sans demander son reste, il partit, la jolie blonde entre les bras, constatant avec satisfaction que personne ne lui barrait la route. Il regagna donc le couloir, mais au lieu de la laisser là, il choisit de la retenir encore un peu, par pure mesure de précaution.

Comme il ne doutait pas une seule seconde que les gardes se mettent à le suivre sous leurs formes animales, Sayanel décida de prendre de la vitesse. Sa position actuelle avec celle qui, il en était sûr à présent, était la reine n'étant pas des plus confortable, il troqua l'épée avec une dague venimeuse et passa une main sous ses genoux, la faisant basculer dans ses bras.

Elle était étonnamment légère, aussi n'eut-il aucun mal à courir à travers les couloirs, tout cherchant un échappatoire. N'importe quoi aurait suffi, pourvu qu'il puisse sortir du palais en lui-même. Enfin, à sa gauche, il remarqua une fenêtre qui donnait sur une cour extérieur. L'endroit parfait pour se cacher quelques instants, le temps d'y voir plus clair et éventuellement d'extraire le poison du cobra de ses veines. Car mine de rien, il commençait à se sentir de plus en plus lourd.

Un jolie coup, en effet... fallait-il encore que l'adversaire ne soit pas un imbécile fini ou sucidaire. Elle, elle avait touché le gros lot: imbécile et sucidaire à la fois. Brusquement l'homme avait poussé le sosie, lui arrachant l'épée des mains, par malheur la dague de la reine n'avait pas touché la carotide dans l'action et en plus il l'avait pris en otage. Toujours la dague en main, elle l'a fit glisser dans l'une de ses manches et se laissa aire telle une poupée. Une grande partie des gardes en animaux sortir de l'ombre, plus agressif les uns que les autres. Sifflements, grongnements, meuglements rompèrent le silence de la pièce tandis que l'homme regardait, l'air serein, la scène qui se jouait devant lui.

Entre ses bras, Lyria sentait que malgré le calme apparent, ses muscles étaient crispés. Un doux tremblement de stresse s'éprit de son bras portant l'épée. A quelques centimètres de son estomac, le coup serait fatal. La reine, quant à elle, était réellement sereine; dans son esprit, un plan se mettait en place afin de se libérer et sa vengeance pour cet affront, devenait de plus en plus violente. Un léger sourire sadique conquit son visage et quel dommage qu'il ne puisse le voir...

- Plus un geste ou elle meurt.

D'un geste lent et calculé, elle lança un regard à son chef de gardes pour lui demander de ne pas agir. Le cobra siffla, signe d'aquiéscement, et l'homme ne remarqua rien; parfait. Il sortit à reculons de la pièce puis se mit à courir juqu'au bout du couloir mais au lieu de la laisser là, il l'attrapa en-dessous des genoux et commença à la porter, tel un couple dégoulinant de romantisme des films terriens. Il était encore plus sucidaire et elle plus légère que prévu, le pire étant qu'il ne se doute de rien alors qu'elle ne se débattait même pas. Au bout d'un certain moment il arriva près d'une fenêtre qui donnait sur une cour extérieur.

Il enjamba la fenêtre d'un pas plus lourd qu'au début. Il ne la lâcha pas en arrivant dans la cour déserte, pensant sûrement que près de lui, elle ne pourrait pas lui faire de mal.
[en cours]